Contre les acouphènes, ce qui marche vraiment !
Sa perception diffère selon les individus, l’acouphène peut être anecdotique pour certains, et intolérable pour d’autres.
« Si nous restons très ignorants des mécanismes qui les sous-tendent, nous savons qu’une grande majorité d’acouphènes est associée à une perte de l’audition, précise Yves Cazals, directeur de recherche à l’Inserm, spécialiste des anomalies auditives.
Moins d’informations parviennent au cerveau. Une hypothèse suggère que le cerveau, en réaction, pourrait s’auto-exciter et augmenter sa sensibilité. L’acouphène correspondrait alors au bruit de fond “amplifié” de l’activité spontanée du système auditif. »
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Les traitements actuels de l’acouphène, nécessairement pluridisciplinaires, ont pour objectif de permettre au patient de s’y habituer au point de l’oublier.
Un médecin ORL effectue d’abord un bilan auditif et vérifie l’absence de maladies, de tumeurs ou de malformations de l’oreille (environ 10 % des cas). « Il explique aussi les bases physiopathologiques de l’acouphène, essentielles pour justifier les thérapies proposées », souligne le Dr Marie-José Esteve-Fraysse, ORL au CHU Purpan (Toulouse).
La thérapie sonore d’habituation
Le principe : habituer le cerveau à entendre un bruit sans l’écouter, pour transposer cette aptitude à l’acouphène.
Comment ? En écoutant sur un lecteur MP3 un bruit blanc ou des bruits d’eau quelques heures par jour. L’audioprothèse est en général préférée, à plus forte raison si l’acouphène est associé à une perte d’audition.
« Augmenter le gain de l’appareil sur les fréquences perdues va améliorer l’audition et stimuler les zones des voies auditives qui ne reçoivent plus d’informations », explique le Dr Esteve-Fraysse.
Les résultats ? « Pour être efficace, ce dispositif nécessite un accompagnement favorisant l’implication du patient. Les résultats, positifs dans plus de 50 % des cas, apparaissant après plusieurs mois », poursuit la spécialiste.
La sophrologie
Le principe : donner au patient des outils de détente – exercices de respiration et de relaxation – afin qu’il puisse gérer, au quotidien, les moments où la perception de l’acouphène est intense, l’enjeu étant de ne plus y prêter attention.
On sait en effet que la perception d’un acouphène met en jeu les aires auditives et le système limbique du cerveau impliqué dans les émotions.
Ce qui explique que l’acouphène s’exprime plus volontiers chez une personne anxieuse ou stressée, et que le stress nourrisse l’acouphène.
Or, « la sophrologie apaise le système nerveux et émotionnel », souligne Patricia Grévin, sophrologue.
Ce suivi, idéalement individuel, s’articule autour de six séances d’une heure, réparties sur deux mois.
Les résultats ? « Cette thérapie fonctionne bien, à condition d’être dans une démarche active et motivée. Les rares échecs se rencontrent chez les personnes zappant d’une technique à l’autre ou ayant des résistances psychologiques très fortes », note la sophrologue.
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L’ostéopathie
Le principe : l’ostéopathie aide à libérer les dysfonctions d’ordre mécanique, musculaire ou émotionnelle.
Ainsi, l’ostéopathie est-elle parfaitement indiquée pour lever des tensions musculaires excessives au niveau des zones cervicales ou de l’articulation de la mâchoire.
« L’intensité de ce type d’acouphènes, dits somatosensoriels, étant modulée par le mouvement », précise le Dr Esteve-Fraysse. Par exemple lorsque l’on mange, que l’on s’allonge, ou que l’on tourne la tête.
Les résultats ? « Dans ma pratique, environ 50 % de réussite, avec une nette diminution de la perception de l’acouphène… et donc autant d’échecs », avance Michaël Illouz, ostéopathe.
Ce spécialiste des acouphènes et pathologies ORL préconise, lui, trois séances sur trois mois, pas davantage.
« Un échec est souvent lié à un contexte émotionnel (décès, licenciement…), ajoute l’ostéopathe. A l’inverse, les meilleurs résultats se manifestent chez un patient qui se sera aménagé une vie plus sereine ou aura changé sa perception du stress. »
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La thérapie comportementale et cognitive (TCC)
Le principe : « La thérapie comportementale et cognitive aide à se désensibiliser à la perception de l’acouphène, dit le Dr Philippe Peignard. En pratique, la personne est confrontée aux états que suscitent l’acouphène, et aux situations qui l’aggravent ; ceci afin de lui démontrer, par des techniques issues de la “pleine conscience” utilisée en méditation, qu’elle peut les dépasser.
Petit à petit, elle va ainsi réinvestir les champs de la vie quotidienne délaissés comme la lecture ou la fréquentation d’endroits bruyants ou silencieux. »
Le protocole standard ? Trois entretiens individuels suivis de huit séances de groupe.
Les résultats ? Ils sont bons chez environ 70 % des patients, « les difficultés se rencontrant chez ceux ayant du mal à accepter la part émotionnelle importante de l’acouphène, ou encore très dépressifs, qui doivent d’abord bénéficier d’un suivi adapté. »
Capital : s’adresser à un praticien formé à la TCC appliquée aux acouphènes. Infos auprès de l’Association française de thérapie comportementale et cognitive, www.aftcc.org.
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Encore à l’étude : les implants cochléaires
Le principe : une prothèse introduite dans l’oreille interne stimule directement le nerf auditif en lui envoyant des informations électriques.
« Une méthode d’abord réservée aux surdités profondes, qui s’est avérée très efficace à la fois pour le traitement de la surdité et des acouphènes, note Yves Cazals. On a donc ouvert les indications aux patients souffrant d’une surdité partielle et d’acouphènes, en réalisant des implants courts pour stimuler les aigus. »
Les résultats ? Depuis cinq ans, des chercheurs expérimentent avec succès des implants sur des personnes dont l’acouphène est invalidant, même si la surdité est légère, voire inexistante.
« On peut donc envisager la mise au point d’implants très légers, à peine introduits dans l’oreille. »
Info pratique
Des équipes pour vous aider. Privées ou publiques, elles sont spécialisées dans la prise en charge pluridisciplinaire de l’acouphène. Renseignements auprès de France Acouphène, www.france-acouphenes.org